Actualités RSE du 09/09/2024

Charles Lorin
September 16, 2024

Introduction

Cette semaine, dans les actualités RSE, les pays du G20 n’ont pas encore adopté de trajectoires ambitieuses pour sortir des énergies fossiles, et les politiques de réduction des émissions de GES n’ont pas vraiment d’effet significatif… Bref, le passage à l’action est compliqué.

Pourtant, de nombreuses solutions se mettent en place, notamment la taxonomie verte, qui aide les entreprises à piloter leur stratégie RSE, et la CSRD, même si elle est challengée par le rapport Draghi.

Retrouvez les 10 actualités phares RSE de la semaine dans cet article.

CSRD et réglementations RSE lourdement attaquées

Ce 9 septembre, le rapport Draghi a été remis à la Commission Européenne et plaide pour une “simplification” massive des réglementations, jugées trop contraignantes pour la compétitivité des entreprises. Très attendu, il pose la question de l’équilibre à maintenir entre performances RSE et performances financières dans l’entreprise.

Sous la pression des concurrences américaine et chinoise, la compétitivité des entreprises ferait face à un “fardeau réglementaire”, affirment les fonctionnaires de la Commission Européenne dans le rapport. Cela menace directement la CSRD, la CSDDD, la taxonomie verte, le règlement européen sur les déchets ou encore la SFDR. Autant de garde-fous qui encadrent l’activité économique des entreprises européennes.

Cette simplification louée par le rapport ouvrirait la voie d’une déréglementation, risquant d’occasionner une dérégulation des pratiques susceptibles de lourdement freiner la transition verte européenne.

20 ans d’inefficacité des politiques climatiques ?

Un article publié dans la célèbre revue Science fait état d’un profond manque d’efficacité des politiques de réduction des émissions des GES ces 20 dernières années. 1500 mesures ont été recensées et étudiées, issues de 41 pays. Résultat : seules 63 “ont eu un effet vraiment significatif” sur la réduction des émissions.

Les chercheurs notent que la seule réponse à apporter à cette inefficacité est la combinaison des mesures entre-elles : Prises isolément, ces mesures n’ont qu’un effet très réduit sur la réduction des émissions de GES.

Ainsi, associer à la fois des interdictions, des incitations et des taxes dans une seule et même politique, appliquée à un secteur donné, serait le moyen véritablement efficace pour en finir avec une accumulation superflue de mesures qui manquent d’une réelle ambition climatique.

Quelle prise en compte de la taxonomie verte par les entreprises françaises ?

KPMG a publié une étude consacrée au rapport qu’entretiennent les entreprises françaises avec les taxonomies vertes européennes. Concentrée sur un périmètre de 60 entreprises issues de 14 secteurs concernés par les réglementations, cette étude questionne leurs stratégies RSE.

Il apparaît que 55% d’entre-elles affirment piloter leur stratégie RSE “en tenant compte de la taxonomie verte européenne”. Plus encore, 87% estiment que leur chiffre d’affaires, CapEx ou OpEx “est aligné” sur au moins un objectif contenu dans ces taxonomies.

Autrement dit, la classification européenne des activités économiques selon leur durabilité semble avoir une influence d’importance sur les stratégies d’impact des entreprises françaises. Cela traduit “une forte volonté de réaliser des investissements de manière durable”, estime l’étude.

La sobriété, seule perspective crédible de décarbonation ?

L’Institut Jacques Delors a publié un décryptage qui porte sur la sobriété énergétique. Ce dernier questionne la valeur politique généralement attribuée à cette notion. En effet, la sobriété est souvent invoquée par les pouvoirs publics dans le cas d’une crise, pour justifier temporairement des mesures d’austérité à l’occasion de gros impondérables et chocs économiques par exemple.

Ce rapport soutient au contraire qu’il faudrait faire de la sobriété un “objet politique à part entière” inscrit dans l’élaboration à long terme des politiques publiques en matière d’énergies.

Pour cela, ils appellent à mesurer les bénéfices potentiels de la sobriété, via des indicateurs d’évaluation et de suivi, aptes à souligner l’intérêt d’une politique de sobriété long-terme. En effet, de telles anticipations, qui nécessitent d’investir lourdement dans des infrastructures durables, “demeureront inférieurs au coût de l’inaction”.

Crédits carbone : 37 projets chinois radiés par un grand organisme

Le grand organisme Verra, spécialiste de l’échange et de la labellisation des crédits carbone, a radié 37 projets chinois de riziculture de son registre de certification. Jugés trop peu fiables, cette décision est une mauvaise nouvelle pour un marché volontaire des crédits carbone déjà fragilisé.

Ces projets de riziculture en Chine se révèlent bien plus émetteurs en GES qu’annoncé, et l’organisme Verra met sérieusement en doute l’additionnalité de ces projets de compensation.

Ainsi, on peut craindre que ce marché des crédits carbone ne se “dégonfle” peu à peu, avec une demande qui a chuté de 56% en 2023. Gilles Dufrasne, de l’ONG Carbon Market Watch, parle d’une “prise de conscience de la part des entreprises”, qui s’en détournent de plus en plus.

Où en est-on avec les obligations vertes ?

Une obligation qui engage son émetteur à financer des projets respectueux de l’environnement est dite “verte”. Fin 2023, le marché des obligations vertes pesait 1 834 milliards d’euros. En pleine accélération depuis 15 ans, on constate que ce marché est financé par des acteurs de plus en plus diversifiés.

L’Europe représente 41% du marché mondial de ces obligations vertes, et l’euro en constitue 50% des émissions. France, Allemagne et Italie forment le trio de tête des grands émetteurs européens en 2023 et maintiennent le continent à sa place de leader mondial en la matière.

Toutefois, le secteur bancaire d’un côté et les services publics de l’autre sont des acteurs prenant une place grandissante sur ce marché. De plus, on observe les débuts d’une réelle diversification géographique de cette dynamique, avec une l’entrée en lice des pays émergents : “En 2023, l'Inde, le Brésil, l’Égypte, ou encore la Turquie ont émis leurs premières obligations vertes souveraines”.

Comment bien mesurer son impact social ?

Si la mesure des performances environnementales de l’entreprise est de plus en plus fiable, celle de son impact social continue de connaître un certain flou méthodologique. Il existe à ce jour plusieurs démarches de reporting, “toutes perfectibles”.

La méthode des “coûts évités” s’est imposée en France, et désigne les actions qui permettent d’éviter des dépenses à la collectivité. Toutefois, cette approche n’est pas convaincante pour tout le monde et tend à monétiser des démarches dont la raison d’être est l’impact positif.

Ainsi, monétiser les démarches à impact social positif peut se révéler un moyen efficace d’en souligner la valeur sociale. Toutefois, ce n’est pas une fin en soi, mais plutôt une manière d’en valoriser l’importance : “Le risque serait ainsi de valoriser uniquement des effets économiques et non des effets sociaux parfois prédominants”, lit-on dans une étude réalisée par l’ESSEC et l’Impact Tank.

Un G20 timide sur les énergies fossiles ?

Des ONG ont fait part de leurs inquiétudes concernant la faiblesse des engagements pris par les pays du G20 d’adopter des trajectoires ambitieuses de sortie des énergies fossiles. Pourtant, il s’agissait d’une “promesse cruciale” de la dernière COP28.

On apprend également que les projets de déclarations devaient initialement reprendre cet engagement de la COP28 d’entreprendre une “transition juste” vers une sortie des combustibles fossiles. Or, la présidence brésilienne du G20 semble l’avoir omise de ses documents de travail.

Ainsi, l’ONG brésilienne Observatoire du climat affirme que “la résistance des pays” à mentionner les “énergies fossiles et la nécessité d'en sortir est évidente”. Cela rejoint les craintes exprimées par d’autres ONG et associations d’une prise en compte bien trop faible de l’enjeu essentiel qu’est la réduction du recours aux combustibles fossiles dans les systèmes d’énergies.

Les émissions de méthane menacent gravement les objectifs climatiques

Le rythme auquel augmentent les émissions de méthane (CH4) dans l’atmosphère accélère dangereusement ces dernières années, d’après un nouveau bilan mondial du méthane publié dans la revue Environmental Research Letters par près de 70 scientifiques du Global Carbon Project.

Tandis qu’il est le deuxième GES le plus important, le méthane est responsable d’un tiers environ du réchauffement climatique. Sa grande différence avec le CO2 est sa durée de vie : 9 ans seulement dans l’atmosphère. Pourtant, son pouvoir de nuisance lui est 80 fois supérieur sur 20 ans.

Le rapport identifie que la source de ces émissions record est majoritairement liée aux énergies fossiles, à l’agriculture et aux déchets. L’année 2020, la plus récente où des données complètes sont accessibles, affiche le nombre de 400 millions de tonnes de méthane d’origine anthropique émises.

Les géants de la tech réduisent leurs voyages aériens

L’ONG Transport & Environment s’est penchée sur l’impact écologique des voyages d’affaires des géants de la tech. Sur les 26 entreprises étudiées, seules 7 affichent “des objectifs clairs” en la matière.

Toutefois, on observe une réduction globale de 49% de leurs émissions générées par leurs voyages d’affaires, en comparaison de 2019. De là, deux éléments sont à prendre en considération :

Ces réductions tiennent principalement à une transformation des modalités de l’interaction professionnelle, via l’avènement du télétravail et des visioconférences.

Les plus gros acteurs de la tech, tels Google ou Apple, n’ont pas fixé de trajectoires particulières de réduction et affichent des résultats près de deux fois inférieurs aux autres entreprises.

Ainsi, il en ressort que “l'adoption de stratégies claires” est un moyen privilégié de l’adaptation et de l’atténuation du changement climatique.

Les sources

Novethic “Le rapport Draghi pourrait “tuer” la CSRD et le devoir de vigilance européen“

Youmatter “Seulement 4,2 % des politiques climatiques mondiales sont vraiment efficaces”

Youmatter “Brèves RSE, Taxonomie verte”

Carenews “L’Institut Jacques Delors publie un décryptage sur la sobriété énergétique”

Novethic “Pour la première fois, une quarantaine de projets de crédits carbone radiés en raison de leur inefficacité”

RSE Magazine “Les obligations vertes, moteur de la transition énergétique et levier financier pour la durabilité”

Youmatter “Faut-il monétiser l’impact social pour mieux le valoriser ?”

L’info durable “Climat : les ONG s'inquiètent d'un manque d'ambition du G20 sur les énergies fossiles”

Le Monde “Les émissions de méthane n’ont jamais été aussi élevées, mettant en péril les objectifs climatiques”

RSE magazine “Les grandes entreprises technologiques réduisent de moitié leurs émissions liées aux voyages d'affaires”